lundi 13 décembre 2010

Je voudrais, avant tout, remercie la Région de Toscane, qui nous accueille à Florence, cette belle ville, qui incarne si bien la dimension culturelle et patrimoniale que nous voulons renforcer dans le tourisme méditerranéen de demain.

Je vais évoquer, avec une sensibilité sud-méditerranée non dissimulée, trois questions qui me paraissent importantes, au regard du thème de la coopération euro-méditerranéenne, qui nous réunis aujourd’hui.


§ Dans quelles conditions les pays de la rive Sud abordent-ils les défis de la durabilité et de la compétitivité de leur tourisme ?

§ Avec quels atouts l’Algérie affronte-t-elle ces mêmes défis ?

§ Quelles sont les attentes des pays du Maghreb, par rapport à la coopération euro-méditerranéenne ?

1- Par rapport à la première question :

Ø Je commencerais par faire un constat général, celui de l’hétérogénéité et de la fragmentation de l’espace touristique méditerranéen, des caractéristiques que la crise économique et financière actuelle à accentué, avec des répercutions extrêmement négatives sur la durabilité et la compétitivité du tourisme, dans la région méditerranéenne.

Aujourd’hui, la montée des problèmes de non-durabilité est perceptible un peu partout dans la région méditerranéenne. Les pertes de qualité et de compétitivité touchent aussi bien les destinations matures de la rive Nord que les destinations en développement ou émergentes de la rive Sud.

La première conclusion qui s’impose est que ; sans redressement de ce scénario, la Méditerranée courre un risque réel de dévaluation, en tant que première zone touristique mondial.

Ø Autre constat : Alors que les pays de la rive Nord font preuve de résilience face à cette crise, en se dotant d’une politique touristique européenne intégrée, assortie d’un processus opérationnel parfaitement maitrisé, les pays de la rive Sud n’en finissent pas de pâtir de la crise, dont les effets dépressifs sont aggravés par les pratique commerciales des grands tour-opérateurs qui exacerbent la concurrence entre les destinations méditerranéennes, standardisent l’offre et tirent la qualité et les prix vers le bas.

Deuxième conclusion : Dans ce contexte de fragilisation de la rente touristique et de lutte des prestataires pour leur survie, le discours sur la durabilité passe, évidemment, au second plan.

Ø Par rapport à l’avenir, les questions de la durabilité et de la compétitivité se posent en termes existentiels, pour les pays de la rive Sud, tant sont grandes les menaces qui pèsent aussi bien sur l’intégrité de leur tourisme, que sur la viabilité de l’économie touristique. Le processus de renouvellement de l’offre touristique, sur une base durable et compétitive, constitue par conséquent une nécessité vitale pour ces pays.

2 S’agissant de l’Algérie, trois éléments favorables à la durabilité et de la compétitivité méritent d’être soulignés :

Ø 1er élément : Pour de multiples raisons, le tourisme algérien n’a pas atteint le même niveau de développement que dans les autres pays de la région. Pour regrettable qu’il puisse être, ce retard est, d’un point de vue prospectif, une chance, au sens ou il permet d’éviter les erreurs qui se sont produites ailleurs et d’assoir le développement touristique futur, sur une base durable et compétitive.

Ø 2ème élément : Toutes les projections indiquent que la progression des flux touristes internationaux à destination de l’Algérie sera relativement modérée durant les 15 prochaines années, en raison d’une configuration concurrentielle sous-régionale défavorable sur le balnéaire et du prima, pour longtemps encore, de la rente pétrolière dans la structure des recettes extérieures de l’Algérie. Cette modération de la fréquentation touristique des destinations algériennes ouvre la voie à un développement touristique basé davantage sur la valeur ajoutée que sur le nombre.

Ø 3ème élément: Dans le cadre de sa nouvelle stratégie, l’Algérie s’oriente résolument vers, d’une part, un tourisme international de «niche», qui valorise le potentiel éco-touristique des espaces sahariens, et, d’autre part, un tourisme balnéaire extensif, ciblant principalement une clientèle nationale. Ce choix stratégique trace la voie à un développement touristique mieux maitrisé, au plan environnemental, équitable, au plan territorial et suffisamment rémunérateur, au plan économique.

Ces éléments font de l’Algérie un champ privilégié de concrétisation des principes de la durabilité et de la compétitivité, au Sud de la Méditerranée.

3 Dernier point: Comment optimiser l’apport de la coopération euro-méditerranéenne à l’avènement d’un tourisme durable et compétitif, profitable à l’ensemble des destinations méditerranéennes ?

Faute de temps, je me limite à la présentation de quelques pistes de réflexion :

Ø 1ére piste : Si jusqu'à présent la majeure partie des initiatives et des actions de coopération se sont inscrites dans le cadre bilatéral et ont manqué d’efficacité, désormais, compte tenu de la transversalité des enjeux et de la globalité des défis, c’est d’une dimension multilatérale complémentaire, expression de la solidarité entre partenaires, que le tourisme méditerranéen à besoin pour se renouveler et conforter son leadership mondial.

Ø 2éme piste: Les PME touristiques sont en première ligne dans le combat pour un tourisme méditerranéen plus vertueux, encore plus performant et mieux enraciné dans l’économie locale. Elles sont à la base de la durabilité et de la compétitivité d’une destination. Elles nécessitent, de ce fait des mesures de soutien spécifiques, pour améliorer leur contribution à la durabilité et la compétitivité des destinations touristiques.

Ø 3émepiste : La coopération euro-méditerranéenne doit être au service de la complémentarité et non de la concurrence entre les secteurs touristiques nationaux. L’avènement d’un secteur touristique méditerranéen unifié, avec des outils de promotion et de commercialisation conjoints, constitue le meilleur gage de compétitivité sur le marché global.

Ø 4émepiste : La formation et la qualification du capital humain doit constituer un champ d’intervention prioritaire de la coopération euro-méditerranéenne, car elles sont des facteurs essentiels pour l’essor futur du tourisme méditerranéen et à l’émergence de destinations d’excellence.

Ø 5èmepiste : L’UE et les pays développés de la rive nord auront un rôle important à jouer. Ils devront notamment engager des politiques de coopération dans un esprit de co-développement et s’ouvrir davantage à leurs partenaires de la rive Sud, pour relever ensemble le défi commun de la durabilité et de compétitivité du tourisme méditerranéen. C’est avec les pays de la rive Sud que se construira la «marque méditerranéenne», que nous ambitionnons et que nous ferons de la Méditerranée un espace commun d’opportunités interculturelles et de profit partagé. L’Europe doit intégrer l’idée selon laquelle les pays de rive Sud ne sont pas que des pourvoyeurs d’immigration clandestine. Ils sont surtout de formidables relais de croissance, pour des économies européennes en quête d’un nouveau souffle.

Pour conclure, je voudrais exprimer l’espoir que cette rencontre débouche sur des convergences, qui permet d’éviter que de nouvelles disparités ne viennent se superposer à celles qui existent déjà et brouiller ainsi l’image touristique de la Méditerranée.

Je vous remercie de votre attention.

Azeddine ABDENNOUR

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